20 novembre 2017

Lieux et rencontres surprenants sur le chemin de Port Lincoln

Six heures du matin, je sors de mon « lit », encore anesthésié par une nuit n’ayant pas été des plus confortables. La voiture ainsi que la toile de la tente sont recouvertes d’une fine couche de givre qui commence à fondre sous l’effet des premiers rayons du soleil. Sur une plaine, au milieu d’une végétation aride où seules les plantes les plus résistantes survivent, se lève un soleil sans nuage alentour, annonçant une belle journée. Comme toujours, j’en profite pour me réveiller en douceur sans que personne ne perturbe ce moment de silence et de paix.

Camping gratuit
L’aire d’autoroute servant de camping de fortune. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien
Lever soleil désert
Lever de soleil dans le désert. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien

En route pour Port Lincoln

Les filles prêtes, nous entamons la route dans un nouvel environnement. Une très grande ligne droite, dans un désert sans aucun relief où l’on rencontre une voiture toutes les demi-heures.

Route Port lincoln
Sur la route de Port Lincoln. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien
Désert South Australia
Une route un peu ennuyeuse. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien

Pour notre prochaine destination, nous avons choisi de nous arrêter à Port Lincoln, une ville réputée pour deux attractions à ne pas louper lorsque l’on est en Australie, à savoir :

  • La plongée en cage avec des requins blancs ;
  • Nager avec les lions de mer

Il s’agit d’un des temps forts de ce road trip que j’attends avec impatience depuis des semaines ! Notre séjour à Port Lincoln est planifié du début à la fin, qui je l’espère se passera comme prévu contrairement à Adelaïde.

Haltes à Whyalla et Tumby Bay

Sur le chemin nous amenant à Port Lincoln, nous apercevons sur le bas-côté un énorme engin de guerre. Intrigués, nous nous arrêtons pour en savoir un peu plus sur la présence de ce bateau en plein milieu du désert. Il s’agit du HMAS Whyalla J153/B252, une corvette datant de la Seconde Guerre Mondiale, construite ici, dans la commune de Whyalla. Ce navire est l’attraction principale d’un musée maritime, situé juste à côté d’une zone militaire. L’entrée étant payante, nous nous contentons d’admirer le HMAS Whyalla de l’extérieur avant de reprendre la route.

Navire de guerre
Le HMAS Whyalla. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien
HMAS Whyalla
Un navire assez imposant. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien

Deux heures plus tard, nous faisons une deuxième halte afin de nous dégourdir les jambes et prendre un café dans un petit village en bord de mer, Tumby Bay (situé à environ trois-quarts d’heures de Port Lincoln). Nous nous garons en face de la plage dont l’eau est d’un calme olympien et d’une couleur bleue turquoise donnant envie de s’y baigner.

Plage Tumby Bay
La plage de Tumby Bay. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien

A peine sortie de la voiture, Patricia fait bande à part et décide de faire une balade le long de la plage. Ce n’est pas plus mal car son mutisme et son comportement négatif commencent à me taper sur le système. Je suis certain qu’elle reste avec nous uniquement par intérêt, ayant besoin de la voiture pour rejoindre Perth où elle a réservé un billet d’avion. Elle pourrait au moins faire un effort pour que la fin du road trip se passe bien, ne serait-ce que par respect et reconnaissance de la laisser continuer la route avec nous alors que je pourrais très bien la planter ici.

Après avoir acheté une boisson chaude, Jade et moi nous dirigeons également vers la plage. Au loin, sur le sable, nous apercevons un groupe de pélicans se dorant la pilule juste à côté d’un ponton de bois. Nous nous approchons doucement vers eux pour ne pas les effrayer mais ces derniers semblent totalement indifférents à notre présence. Tant mieux, cela nous permet de prendre de belles photos de ces grands oiseaux assez impressionnants. Jade préfère rester à distance, de peur de se faire attaquer par l’un d’eux. Pour ma part, au contraire, je m’approche au plus près.

Pélicans Tumby Bay
Les pélicans de Tumby Bay. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien
Pélicans
Les pélicans de plus près. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien

Nous décidons de les laisser tranquille et marchons sur le ponton. Nous profitons de cette magnifique vue où l’on voit quelques bateaux amarrés au large. Des gens sautent à l’eau, certains avec un appareil photo étanche, d’autres avec un harpon, s’adonnant à leur loisir favori.

Ponton Tumby Bay
Le ponton de Tumby Bay. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien
Baie Tumby Bay
La baie de Tumby Bay. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien
Tumby Bay
Tumby Bay. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien

L’auberge de jeunesse de Port Lincoln

En milieu de journée, nous quittons Tumby Bay pour arriver à l’auberge de jeunesse YHA de Port Lincoln.

En rentrant dans le hall, nous sommes mis rapidement dans l’ambiance :

  • Les murs sont tapissés de stickers d’animaux marins ;
  • Des statues de lions de mer et de tortues ont été disséminées dans toute la pièce ;
  • Cerise sur le gâteau avec une grande cage et un requin ouvrant largement sa gueule, prêt à dévorer n’importe quels backpackers trop aventureux.
cage requin Port Lincoln
Aperçu de la plongée en cage. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien

Nous sommes accueillis par la propriétaire qui nous propose de faire le tour de l’auberge. Je crois que je n’ai jamais vu un backpack aussi propre, bien entretenu et moderne de toute ma vie. Si je devais donner une note sur 10 je mettrais un 20 ! Une cuisine sans nourriture qui traîne, ni vaisselle sale, des salles de bain et toilettes semblant tout juste rénovées, une chambre avec de vrais et grands lits ainsi qu’un salon et une terrasse avec des écrans géants. C’est vraiment le paradis.

Cuisine YHA
La cuisine du YHA de Port Lincoln. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien
Lit YHA
La chambre de l’auberge. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien
Urinoirs YHA
Des urinoirs qui font peur ! Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien

La propriétaire souhaitant que cet endroit reste impeccable, nous explique les règles de vie à l’hôtel qu’il faut suivre à la lettre sous peine d’être viré d’ici. Elle souligne à maintes reprises le fait que nous devons laisser les pièces propres, dans le même état que nous les avons trouvées en entrant.

La visite terminée, elle nous demande les raisons de notre venue à Port Lincoln même si elle les connaît déjà. Demain matin, j’ai prévu de nager avec les lions de mer tandis que Patricia et Jade visiteront la ville. Puis, le jour d’après, nous partons faire une plongée en cage en espérant voir des requins blancs avec l’agence Adventure Bay Charters. À cet instant, elle nous coupe la parole pour nous dire que cette compagnie est très bien pour les lions de mer mais n’est pas la meilleure pour les requins compte tenu de la méthode utilisée pour les attirer vers le bateau. Adventure Bay Charters utilise les ultra-sons produits par la musique d’AC/DC alors que leur concurrent Calypso Star Charters jette du sang et des restes de poissons dans l’eau. Comme toutes les agences partent au même endroit, les requins privilégient le Calypso aux autres opérateurs n’ayant pas l’autorisation légale pour utiliser le sang et les cadavres de poissons. En un instant, je sens le stresse monter en moi, ne voulant pas revivre la catastrophe des dauphins à Adelaïde…

Port Lincoln et ses alentours

Bien installés, nous demandons à la propriétaire du backpack ce qu’il y a à visiter dans les parages, voulant profiter de la fin de journée. Cette dernière nous suggère de partir vers les hauteurs de Port Lincoln afin d’admirer la vue et le coucher du soleil puis de partir en centre-ville pour boire un coup dans un pub. Elle nous invite aussi à faire des balades sur plusieurs plages si l’on en a le temps entre les lions de mer et les requins.

Avant de partir, elle nous demande si nous pouvons inviter une des pensionnaires de l’auberge qui n’a pas de moyen de locomotion pour découvrir les alentours de Port Lincoln. Il s’agit d’une Italienne qui est actuellement à l’extérieur en train de fumer une cigarette.

Nous partons à sa rencontre et discutons un peu de son parcours en Australie et de ses raisons d’avoir quitté l’Italie. Comme beaucoup de backpackers, la crise, les conditions de travail et les salaires ridicules en Europe l’ont incitée à venir se réfugier à l’autre bout du monde. Elle nous parle de ses postes dans l’industrie pharmaceutique en Allemagne puis dans la mode en Espagne au siège de Zara. De mauvaises expériences et plus particulièrement l’Espagne où vous travaillez énormément pour, en reprenant ses mots, « un salaire merdique ainsi qu’un patron dictateur et lunatique ».

Arrivée à Sydney avec son copain, elle avait rapidement trouvé un travail de conseillère clientèle pour une entreprise internationale de poker en ligne, recherchant des étrangers qui parlent au moins une langue de plus que l’anglais (plus particulièrement l’italien, le français et l’allemand, leur principale clientèle). Après six mois dans la société, elle s’est vue proposer un « sponsorship » lui permettant d’obtenir un visa quasi-permanent pour vivre en Australie (à condition de rester plusieurs années au sein de cette entreprise). Malheureusement, la veille de déposer son dossier au service de l’immigration, les lois concernant les visas pour les étrangers ont changé. Les conditions étant beaucoup plus restrictives, son sponsorship n’était plus possible.

Elle ne désire en aucun cas repartir en Europe (comme c’est le cas pour beaucoup d’entre nous) mais n’aura sans doute pas le choix. Elle regrette de ne pas être venue en Australie une dizaine d’années auparavant, lorsque les règles d’immigration étaient plus faciles. À son récit, j’ai l’impression de me reconnaître car moi aussi je vais devoir rentrer en France d’ici quelques mois… Mes supérieures ont toujours voulu que je reste mais il leur était impossible de me faire travailler au-delà de six mois (condition sine qua non du Working Holiday Visa). Si seulement j’étais parti plus tôt, je n’en serais pas là, à stresser à l’idée de retourner en France, pays trop traditionnel, pas assez ouvert d’esprit, où la crise n’a jamais été aussi forte que maintenant.

Après cet instant de regret et de tristesse, nous prenons la voiture et partons au Winter Hill Lookout pour découvrir la vue sur Port Lincoln. Un beau coucher de soleil nous attend et nous profitons de ce spectacle durant un très long moment.

Winter Hill Lookout
Le Winter Hill Lookout. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien
Winter hill Lookout coucher soleil
Le coucher de soleil sur Winter Hill Lookout. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien
Winter Hill lookout
C’est beau, non ? Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien

Nous finissons la soirée dans un pub en bord de mer avec une bière pour les filles et un coca zéro pour moi (le monde à l’envers mais après mes années fac et école de commerce, j’ai développé un sentiment de répulsion vis-à-vis de l’alcool, mis à part les cocktails bien sucrés). Nous repartons dans la discussion que nous avions entamée à l’auberge. Au fil de la conversation, l’Italienne me donne l’adresse email de sa supérieure qui pourrait être intéressée par mon profil. Pour le poste qu’elle a dû quitter, le sponsorship est possible à condition d’avoir un master en marketing, ce qui est mon cas. Cependant, j’ai des doutes quant à cette possibilité car il me reste un peu plus de deux mois avant que mon visa ne se termine définitivement. Généralement les entreprises proposent un sponsorship après avoir travaillé au moins six mois chez eux… Je vais tout de même tenter ma chance, sans grand espoir.

Port Lincoln plage
La plage en face du pub de Port Lincoln. Crédit photo : CHAN OU TEUNG Fabien

Devant me lever tôt pour partir nager avec les lions de mer, je décide de rentrer au backpack afin de profiter d’une bonne nuit de sommeil. Demain va être une journée riche en émotion et sûrement inoubliable que je ne veux rater sous aucun prétexte.

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